Edmundo Bettencourt | Canção do Alentejo ; Canção da Beira Baixa (& Amália Rodrigues & Gisela João)
- Fait suite au billet : Saudades de Coimbra | Edmundo Bettencourt (et José Afonso).
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À l’université de Coimbra les étudiants étaient – et sont encore – originaires de toutes les régions du Portugal. Edmundo Bettencourt, qui était madérien, reste dans l’histoire de la Chanson de Coimbra comme celui qui en a enrichi le répertoire en y incorporant des airs traditionnels provenant de l’ensemble du pays. Il les chantait avec accompagnement de guitares et dans le style vocal de la Chanson de Coimbra. Ainsi de cette très belle Canção do Alentejo (« Chanson de l’Alentejo »), aussi connue sous le titre Lá vai Serpa, lá vai Moura (« Voilà Serpa, voilà Moura »), Serpa et Moura étant deux villes de la partie orientale de l’Alentejo.
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Edmundo Bettencourt (1899-1973) | Canção do Alentejo. Paroles et musique traditionnelles (Portugal, Alentejo).
Edmundo Bettencourt, chant ; [?], guitare portugaise ; [?], guitare classique. Portugal, 1928.
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Autre exemple : la Canção da Beira Baixa (« Chanson de la Beira Baixa »), dont Edmundo Bettencourt laisse le texte au féminin : « Era ainda pequenina… » (« J’étais encore toute petite… ».
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Edmundo Bettencourt (1899-1973) | Canção da Beira Baixa. Paroles et musique traditionnelles (Portugal, Beira Baixa).
Edmundo Bettencourt, chant ; [?], guitare portugaise ; [?], guitare classique. Portugal, 1928.
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J’ai choisi ces deux exemples parce qu’ils sont aussi présents dans la discographie d’Amália Rodrigues, à qui pourrait s’appliquer la « cuisante louange » dont Cocteau gratifia jadis Colette : « Où ne s’est-elle pas fourrée, cette grosse abeille ? ».
Amália a enregistré trois albums de « folklore » comme on disait alors, dont les publications s’échelonnent de 1965 à 1972. Si ces albums, à l’exception du troisième, ne sont pas de grandes réussites, elle n’en est pas la principale responsable. Les deux premiers sont en effet chantés avec accompagnement d’orchestre, dans des arrangements et selon des choix de tempo et de caractère très éloignés de ceux de la chanson traditionnelle. Amália elle-même regrettait, surtout pour le deuxième de ces albums, la trop grande part prise par l’orchestre qui obligeait même à tronquer les parties chantées. On en jugera avec Lá vai Serpa lá vai Moura :
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Amália Rodrigues (1920-1999) | Lá vai Serpa, lá vai Moura. Traditionnel portugais (Alentejo).
Amália Rodrigues, chant ; accompagnement d’orchestre ; Jorge Costa Pinto, direction et arrangements. Extrait de l’album Amália canta Portugal. Enregistrement : février 1965. Portugal, 1975 (première publication).
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Les trois albums de « folklore » d’Amália ont été rassemblés en 2016 dans une nouvelle édition augmentée d’inédits et accompagnée de notes historiques, à vrai dire moins riches que dans la plupart des autres volumes de la réédition intégrale en cours. On n’y trouve pas d’indications précises sur les sources de chacune des chansons présentées. À propos de Lá vai Serpa lá vai Moura, on apprend que sa première strophe apparaît dans le Cancioneiro de Serpa, et que la version enregistrée par Amália est une adaptation de celle extraite du recueil de chansons Cantigas de Portugal, publié en 1922, avec accompagnement de piano, par Alexandre Rey Colaço.
Pour Quando era pequenina en revanche, aucune source n’est citée. On ne dispose que d’une information générale sur son collectage dans la Beira Baixa par Rodney Gallop (1901-1948), un ethnographe anglais qui a travaillé au Portugal entre 1931 et 1933.
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Amália Rodrigues (1920-1999) | Canção da Beira Baixa (Quando eu era pequenina). Traditionnel portugais (Beira Baixa).
Amália Rodrigues, chant ; accompagnement d’orchestre ; Joaquim Luís Gomes, direction et arrangements. Extrait de l’album Amália canta Portugal 2. Enregistrement : 1967. Portugal, 1971 (première publication).
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La Beira Baixa était la région d’origine de la famille d’Amália Rodrigues, qui a régulièrement porté à la scène Quando eu era pequenina dans un arrangement pour guitares portugaises et guitares. Un arrangement qui est, de façon flagrante, inspiré de la manière d’Edmundo Bettencourt, comme on le constatera dans cet enregistrement public de 1987, à Lisbonne.
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Amália Rodrigues (1920-1999) | Canção da Beira Baixa (Quando eu era pequenina). Traditionnel portugais (Beira Baixa).
Amália Rodrigues, chant ; Carlos Gonçalves, Pinto Varela, guitares portugaises ; António Moliças, guitare classique ; Joel Pina, basse acoustique. Enregistré en public au Coliseu dos recreios, Lisbonne (Portugal), le 3 avril 1987.
Extrait de l’album Amália, Coliseu, 3 de abril de 1987 / Amália Rodrigues. Portugal, 1987 (réédité en 2017, augmenté de sept morceaux enregistrés le 4 avril 1987).
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Quando eu era pequenina
Acabada de nascer
Ainda mal abria os olhos
Já era para te ver
Acabada de nascerQuand j’étais toute petite
Quand je venais de naître
J’ouvrais à peine les yeux
Et c’était déjà pour te voir
Quand je venais de naître E quando eu já for velhinha
Acabada de morrer
Olha bem para os meus olhos
Sem vida ainda te hão de ver
Acabada de morrerEt quand je serai toute vieille
Au moment de ma mort
Alors regarde bien mes yeux :
Sans vie, ils te verront encore
Au moment de ma mort …… Traditionnel portugais (Beira Baixa).
Canção da Beira Baixa (Quando eu era pequenina).Traditionnel portugais (Beira Baixa).
Chanson de Beira Baixa (Quand j’étais toute petite). Traduction L. & L.
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En 1987 la voix d’Amália a déjà subi de graves dommages. Voici une reprise de Quando era pequenina, limitée à la première strophe comme dans le premier enregistrement d’Amália, par une Gisela João débutante à la voix pleine et ductile, sobrement accompagnée par une guitare seule.
Gisela João | Canção da Beira Baixa (Quando eu era pequenina). Paroles et musique traditionnelles (Portugal, Beira Baixa).
Gisela João, chant ; Pedro Soares, guitare classique. Captation : Lisbonne, Teatro do Bairro, 2012.
Vidéo : Maria Joana Figueiredo, image ; João Botelho, éclairage ; Federico Pereira, son ; Francisco Veloso, captation sonore. 2012.
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