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Coimbra é uma lição etc.

22 décembre 2019

La circulation était fluide et l’automobile glissait sans que j’entende le bruit du moteur. La radio marchait en sourdine et je me souviens qu’au moment où nous arrivions au pont de la Concorde, un orchestre jouait Avril au Portugal. J’avais envie de siffler l’air. Paris, sous ce soleil de printemps, me semblait une ville neuve où je pénétrais pour la première fois, et le quai d’Orsay, après les Invalides, avait, ce matin-là, un charme de Méditerranée et de vacances.
Patrick Modiano. Quartier perdu (1984). Gallimard, impr. 2017 (Folio ; 1942), ISBN 978-2-07-037942-2. Pages 104-105.

Avril au Portugal, dont il est question à trois reprises dans Quartier perdu, est bien sûr une adaptation française de la célèbre chanson Coimbra popularisée, notamment en France, par Amália Rodrigues.

La chanson originale a été écrite à la fin des années 1930 (une partition conservée à la bibliothèque nationale du Portugal fait état d’un copyright de 1939), mais n’a connu la popularité que grâce au film Capas negras (« Capes noires », 1947), réalisé par Armando de Miranda, dans lequel Amália Rodrigues, qui jouissait déjà d’une très grande célébrité comme fadiste, effectuait ses débuts d’actrice. Ce n’est pourtant pas elle qui y chantait Coimbra, mais l’autre tête d’affiche du film, Alberto Ribeiro.

Les « capes noires » sont celles que portent traditionnellement les étudiants de la fameuse Université de Coimbra – l’une des plus anciennes d’Europe –, parmi lesquels se recrutent les chanteurs du « Fado » et de la « Canção » de Coimbra. Capas negras a rencontré à sa sortie un succès inimaginable et serait, jusqu’à aujourd’hui, l’un des films qui ont connu la plus forte affluence dans les salles portugaises. Ce n’est pourtant pas la version du film qui a fait de Coimbra un succès international, mais celle d’Amália qui, très rapidement, a intégré la chanson à son répertoire.

Amália Rodrigues (1920-1999) | Coimbra. José Galhardo, paroles ; Raul Ferrão, musique.
Amália Rodrigues, chant ; Domingos Camarinha, guitare portugaise ; Santos Moreira, guitare classique.
Extrait de l’émission Music hall parade. Diffusion : 18 avril 1956. Production : Office national de radiodiffusion télévision française. France, 1956.
Première appartition d’Amália Rodrigues à la télévision française, présentée par Georges Ulmer.


Coimbra é uma lição
De sonho e tradição
O lente é uma canção
E a lua a faculdade
O livro é uma mulher
Só passa quem souber
E aprende-se a dizer
“Saudade”.

Coimbra est une leçon
De rêve, de tradition
Le maître est une chanson,
Et la lune, la Faculté,
Le livre est une femme.
Seul réussit celui qui sait
Et apprend à dire
« Saudade ».

Coimbra do Choupal,
Ainda és capital
Do amor em Portugal,
Ainda…
Coimbra, onde uma vez,
Com lágrimas se fez
A história dessa Inês,
Tão linda.

Coimbra du « Choupal* »
Tu es toujours la capitale
De l’amour au Portugal,
Toujours…
Coimbra, où autrefois,
Dans les larmes s’est produite
L’histoire de cette Inês**
Si belle.

Coimbra das canções,
Tão meiga que nos pões
Os nossos corações
A nu;
Coimbra dos doutores,
Pr’a nós os teus cantores,
A fonte dos amores
És tu.

Coimbra des chansons,
Si douce et qui nous met
Nos cœurs
À nu ;
Coimbra des docteurs,
Pour nous, tes chanteurs,
La source des amours,
C’est toi !
José Galhardo (1905-1967). Coimbra é uma lição de amor (Coimbra) (1939?).
.
José Galhardo (1905-1967). Coimbra est une leçon d’amour (Coimbra), traduit de : Coimbra é uma lição de amor (Coimbra) (1939?) par L. & L.
* Le Choupal, littéralement « la peupleraie » : un bois situé en aval de Coimbra, le long de la rive droite du Mondego.
** Inês : Inês de Castro, la « reine morte ».

Coimbra a très vite donné naissance à une adaptation anglaise, sous le titre April in Portugal. La version française, datée de 1949, a été créée l’année suivante par Yvette Giraud (1916-2014), une très grande vedette à l’époque. On peine à y reconnaître Coimbra : l’arrangement et l’accompagnement instrumental en font une rumba (le disque 78 tours de 1950 porte d’ailleurs en titre alternatif « Rumba Coimbra ») et les paroles n’ont rien à voir avec celles de l’original.

Yvette Giraud (1916-2014) | Avril au Portugal. Jacques Larue, paroles ; Raul Ferrão, musique. Adaptation de Coimbra, paroles originales de José Galhardo, musique de Raul Ferrão.
Yvette Giraud, chant ; accompagnement d’orchestre ; Albert Lasry, direction. France, 1950.

6 commentaires leave one →
  1. stj permalink
    22 décembre 2019 12:21

     »Le fado c’est Amalia Rodrigues,il n’y a qu’elle qui sait le chanter »- c’est la meilleure definition du fado 🙂

  2. stj permalink
    22 décembre 2019 13:02

    Merci, »le raccourci » c’est bien le mot que j’ai cherché

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