Sílvia Pérez Cruz & Raül Fernandez Miró aujourd’hui à Paris
…au théâtre des Abbesses, à 17 h, pour présenter leur album granada (2014). Je vois cela à l’instant dans Le Monde.
Si on est à Paris, et s’il reste des places, il faut y aller absolument. Je suis pris de court pour écrire quelque chose d’un peu construit, mais cet album, que j’ai depuis sa parution en Espagne, m’intrigue toujours autant. Il est fait de reprises, seulement. Il est, d’une certaine manière, très ibérique, au sens où Amália Rodrigues employait ce terme en parlant d’elle-même : « je suis une chanteuse ibérique » disait-elle, tout en étant profondément portugaise. Il en va de même de Sílvia Pérez Cruz, absolument catalane, mais ouverte au flamenco, au fado, et au chant en général. Une maîtrise du chant dans cet album granada, flagrante. Un album murmuré, traversé de cris.
C’est un duo chant guitare. Il donne cette impression qu’on est dans la maison où Sílvia Pérez Cruz vaque à ses occupations ordinaires, passant d’une pièce à l’autre, en chantant. La voix est dans la cuisine, et puis elle se rapproche, elle s’éloigne à nouveau, passe au salon. Elle ne chante que pour elle-même, pour ceux à qui elle pense, elle. Son père, mort, sa mère (on les entend l’un et l’autre à la fin du premier morceau, Abril 74, de Lluís Llach), ou ceux qu’elle a en tête. C’est à dire qu’il n’y a aucune grandiloquence dans cet album, et que tous les morceaux qu’il comprend y sont transformés, intériorisés. Les Corrandes d’exili, encore de Lluís Llach, sont fort différents de la version qu’elle en donnait elle-même en scène jusqu’à présent. Le fameux Cant dels ocells, merveilleux noël traditionnel catalan, est ici chanté comme une valse assez rapide, loin de l’interprétation célèbre de sa compatriote Victòria dels Àngels (Victoria de los Ángeles) [voir le billet El cant dels ocells]. Idem des deux lieder de Schumann Im wunderschönen Monat Mai et Aus meinen Tränen spriessen, très libres.
Les chansons espagnoles extraites du répertoire de Enrique Morente sont magnifiques : Pequeño vals vienés (poème de Federico García Lorca, mis en musique par Leonard Cohen) donne la chair de poule. De même : Que me van aniquilando et Compañero (poème de Miguel Hernández).
L’Amérique latine est présente elle aussi : Violeta Parra (Puerto Montt está temblando) et Fito Páez (Carabelas nada).
Une seule erreur à mon sens : L’hymne à l’amour, d’Édith Piaf. Mais il doit avoir un sens pour elle.
Sílvia Pérez Cruz & Raül Fernandez Miró | Pequeño vals vienés. Poème de Federico García Lorca ; musique Leonard Cohen ; Sílvia Pérez Cruz, chant ; Raül Fernandez Miró, guitare. 2014.
Vidéo : Costa Est Audiovisuals i Co. 2014.
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Sílvia Pérez Cruz & Raül Fernandez Miró
granada (2014)
granada / Sílvia Pérez Cruz, chant ; Raül Fernandez Miró, guitares.
Enregistré au studio Calamar, Barcelone, d’avril 2013 à mars 2014. Universal Music Spain, ℗2014.
CD : Universal Music Spain, 2014. — EAN 0602537822270.
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- Internet : http://silviaperezcruz.com
ça coupe le souffle
encore une fois merci pour ramener tout ça dans vos filets…
Superbe !
Le poème de García Lorca, la musique de Cohen et la voix et la présence de Sílvia Pérez Cruz, un alliage magique.
Je m’associe au commentaire précédent, pour l’écoute en apnée et les remerciements pour ces découvertes (pour moi).
Et je trouve que l’enregistrement de l’album est encore plus électrisant que celui-ci, si c’est possible…
cela fait longtemps que je n’avais pas ouvert ton blog et voilà que je tombe à retardement sur ce spectacle…raté ! quel dommage de ne pas t’être fidèle à chaque instant ! Du coup je m’en veux aussi parce que tu ne parles pas du spectacle de Lula Pena qui se tient ce soir vendredi 5 aux Bouffes du Nord et je me dis que tu n’es peut-être pas au courant ! cela fait plusieurs jours que je voulais te l’écrire et le temps manque… j’espère t’y voir..