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Amália • Grito (1983)

20 août 2025

Amália Rodrigues (1920-1999)Grito. Amália Rodrigues, paroles ; Carlos Gonçalves, musique.
Amália Rodrigues, chant ; José Fontes Rocha & Carlos Gonçalves, guitare portugaise ; Jorge Fernando, guitare ; Joel Pina, basse acoustique.
Enregistrement : Paço de Arcos (Portugal), studios Valentim de Carvalho, d’octobre 1982 à mai 1983.
Extrait de l’album Lágrima / Amália. Portugal, Valentim de Carvalho, ℗ 1983.

Silêncio
Do silêncio faço um grito
E o corpo todo me dói
Deixai-me chorar um pouco.
De sombra a sombra
Há um céu tão recolhido,
De sombra a sombra
Já lhe perdi o sentido.
Ó céu!
Aqui me falta a luz
Aqui me falta uma estrela
Chora-se mais
Quando se vive atrás dela
E eu,
A quem o céu esqueceu
Sou a que o mundo perdeu
Só choro agora
Que quem morre já não chora.

Silence.
Du silence je fais un cri
Et mon corps entier me fait mal,
Laissez-moi pleurer un peu.
D’ombre en ombre
Le ciel a tellement rétréci
D’ombre en ombre
Que je n’en trouve plus le sens.
Oh ciel !
J’ai besoin de lumière,
J’ai besoin d’une étoile !
On pleure davantage
Lorsque on vit guidé par une étoile
Et moi,
Que le ciel a oubliée,
Je suis celle que le monde a perdue ;
Je pleure aujourd’hui,
Car les morts ne pleurent plus.
Solidão
Que nem mesmo essa é inteira,
Há sempre uma companheira
Uma profunda amargura.
Ai, solidão
Quem fora escorpião
Ai! solidão
E se mordera a cabeça!
Adeus
Já fui para além da vida
Do que já fui tenho sede
Sou sombra triste
Encostada a uma parede.
Adeus,
Vida que tanto duras
Vem morte que tanto tardas
Ai, como dói
A solidão quase loucura.

Solitude.
Elle ne vient jamais seule,
Car elle a pour compagne
Une profonde amertume.
Ah solitude !
Ah être un scorpion !
Ah solitude
Et se frapper à la tête !
Adieu
Je me suis déjà avancée au-delà de la vie ;
J’ai soif de ce que j’ai été.
Je suis une ombre triste
Adossée à un mur
Adieu
Vie qui dures tant !
Viens, mort qui tardes tant !
Ah qu’elle fait mal,
La solitude, presque folie.

Amália Rodrigues (1920-1999). Grito (1983).
Amália Rodrigues (1920-1999). Cri, traduit de : Grito (1983), par L. & L.

Dans la carrière d’Amália les années 1980 sont celles d’une renaissance douloureuse. La décennie précédente l’avait laissée exténuée, vidée, presque détruite, physiquement autant que psychologiquement. En septembre 1979, fatiguée par les interminables tournées sur tous les continents du monde, éprouvée par les dures années de l’après Révolution des œillets, voici que la chanteuse est victime, en plein récital près de Lisbonne, d’une attaque cardiaque.

Convalescente, contrainte au repos, Amália redécouvre sa propre production poétique et décide, avec l’aide de ses guitaristes Carlos Gonçalves et José Fontes Rocha auprès de qui elle sollicite des compositions musicales, d’en faire des chansons. Désormais elle devient sa principale parolière : en 1980, puis en 1983, sont publiés deux albums dont tous les textes sont d’elle.

Gostava de ser quem era (« J’aimerais être celle que j’étais », 1980), puis Lágrima (« Larme », 1983), sont deux albums tristes dans lesquels sa voix apparaît désormais – et pour toujours – altérée, comme asséchée, délavée, privée de son ancien éclat mais non de sa puissance ni (encore moins) de sa force d’interprétation. L’un et l’autre laissent affleurer l’expression d’une souffrance existentielle, voire physique, et l’obsession de la mort qui devient un thème récurrent des deux ultimes décennies de sa carrière. Deux pièces, semblables à deux cris de douleur, illustrent particulièrement cette humeur ténébreuse : Tive um coração, perdi-o (« J’avais un cœur, je l’ai perdu »), dans Gostava de ser quem era, et cet hallucinant Grito (« Cri »), qui clôt Lágrima de la manière la plus poignante et qui a d’ailleurs été exécuté lors des funérailles d’Amália, à sa demande. La musique est l’une des plus réussies de Carlos Gonçalves.

Ricardo Ribeiro en a donné une interprétation sensible dans l’album collectif d’hommage à la chanteuse Amália : les voix du fado publié en 2015.

Ricardo Ribeiro (né en 1981)Grito. Amália Rodrigues, paroles ; Carlos Gonçalves, musique.
Ricardo Ribeiro, chant ; Ângelo Freire, guitare portugaise ; Diogo Clemente, guitare ; Mário Franco, contrebasse.
Enregistrement : Paço de Arcos (Portugal), studios Valentim de Carvalho, le 24 mars 2015.
Extrait de l’album Amália : les voix du fado = as vozes do fado. France, Decca Records France, ℗ 2015.

2 commentaires leave one →
  1. Avatar de Samuel
    Samuel permalink
    20 août 2025 21:37

    Merci, c’est toujours un plaisir de découvrir vos articles et ces oeuvres. Belle journée.

  2. Avatar de L. & L.
    20 août 2025 22:01

    Merci à vous !
    Ph.

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