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Fado da Loucura. 2. « É loucura »

19 mars 2022

O mundo a rir,
A rir às gargalhadas,
Não tem dó das desgraçadas
Que morrem cantando o fado!

Joaquim Frederico de Brito (1894-1977). É loucura, que eu bem sei (192. ?)

Ce monde qui rit,
Qui rit aux éclats,
N’a nulle pitié des malheureuses
Qui meurent en chantant le fado !

Je ne suis pas parvenu à dater l’apparition de chacune des trois versions du Fado loucura signées de Frederico de Brito ; je ne sais pas non plus avec certitude non plus qui les a créées. Pour la première seule les choses semblent assez claires : cette version date de la fin des années 1920 et elle a été créée par la propre sœur de Júlio de Sousa (le compositeur de la pièce) : Maria Amélia de Sousa (1908-1987), dite Mariamélia. Il en existe un enregistrement publié en 1930. Voici (il faut tendre l’oreille ; le son, transféré d’un disque 78 t en piètre état, est mauvais) :

Mariamélia (Maria Amélia de Sousa, 1908-1987)É loucura, que eu bem sei. Joaquim Frederico de Brito, paroles (couplets) ; Júlio Campos de Sousa, paroles (refrain) & musique (Fado Loucura).
Mariamélia, chant ; accompagnement de guitare portugaise et de guitare.
1ère publication : Portugal, 1930.

Voilà un style de chant bien différent de celui d’artistes telles qu’Amália Rodrigues ou de Maria Teresa de Noronha, dont les débuts ne se produisent pourtant que dix ans plus tard. Le timbre, de même que cette légère emphase dans la diction, sonnent très datés (on trouve des caractéristiques analogues dans la chanson française de la même époque). En outre la chanteuse, qui imite parfois le « gémissement » caractéristique de la guitare portugaise, donne presque l’impression d’accompagner les guitaristes plutôt que l’inverse.


É loucura,
Que eu bem sei,
O ter andado à procura
De alguém que nunca encontrei.

C’est folie,
Je le sais,
D’avoir tant cherché
Quelqu’un que je n’ai jamais trouvé.

Sorte vil,
Que eu lamento.
Até o meu céu de anil
Se tinge a cada momento.

Sort infâme
Que je déplore !
Mon ciel lui-même
S’assombrit jusqu’à l’indigo.

Chorai, chorai,
Guitarras da minha terra,
Que o vosso pranto encerra
As mágoas do passado!

Pleurez, pleurez,
Guitares de mon pays,
Car votre plainte recèle
Les peines du passé !

O mundo a rir,
A rir às gargalhadas,
Não tem dó das desgraçadas
Que morrem cantando o fado!

Ce monde qui rit,
Qui rit aux éclats,
N’a nulle pitié des malheureuses
Qui meurent en chantant le fado !

No meu rosto,
Tenho escrito
O mais profundo desgosto
Por este viver maldito.

Dans mon cœur
Est gravée
La plus profonde aversion
Pour cette vie maudite.

Pobre louca,
Trago em vão
O riso a bailar na boca
E o pranto no coração.

Pauvre folle !
C’est en vain
Que j’ai le sourire aux lèvres
Et les larmes au cœur !
Joaquim Frederico de Brito (1894-1977) & Júlio de Sousa (1906-1966). É loucura, que eu bem sei (192. ?)
Joaquim Frederico de Brito (1894-1977) & Júlio de Sousa (1906-1966). C’est folie, je le sais, traduit par L. & L. de : É loucura, que eu bem sei (192. ?)

De cette première version en dérive une autre, connue surtout par l’interprétation de Lucília do Carmo (1919-1998) — la mère de Carlos do Carmo —, qui l’a enregistrée en 1960. Elle la fait entendre ici, dans son style singulier, direct et presque bourru, anti-amálien au possible, lors d’un gala donné en hommage au fadiste Filipe Pinto en 1962, auquel participaient en outre Amália Rodrigues, Alfredo Marceneiro, Fernando Farinha et Filipe Pinto lui-même.

Lucília do Carmo (1919-1998)É loucura querer-te bem. Joaquim Frederico de Brito, paroles ; Júlio Campos de Sousa, musique (Fado Loucura).
Lucília do Carmo, chant ; Ilídio dos Santos, guitare portugaise ; Orlando Silva, guitare. Enregistrement public, dans le cadre du spectacle donné en hommage à Filipe Pinto au théâtre Tivoli, Lisbonne, le 29 novembre 1962.
Extrait de l’album Tivoli 62. 1ère publication : Portugal, 2015.


É loucura
Querer-te bem.
Sou irmã da desventura
Tinhas razão, minha mãe!

C’est folie
De t’aimer.
Je suis la sœur de l’infortune,
Tu avais raison, maman !

É loucura
Adorar-te,
Estar sedenta de ternura
Sem mesmo poder beijar-te.

C’est folie
De t’adorer,
D’être assoiffée de tendresse,
Sans même pouvoir t’embrasser.

Chorai, chorai,
Guitarras da minha terra,
O vosso pranto encerra
Minha vida amargurada.

Pleurez, pleurez,
Guitares de mon pays,
Car votre plainte recèle
Ma vie de tourments.

E se é loucura
Amar-te desta maneira,
Quer eu queira, quer não queira
Não posso amar-te calada!

Et s’il est folie
De t’aimer à ce point,
Que je le veuille ou non,
Je ne peux taire cet amour.

Hei-de ser
Sempre tua,
Hei-de subir e descer
Os degraus da tua rua.

Je t’aimerai
Toujours,
Sans cesse je parcourrai
Les escaliers de ta rue.

Adorado,
Serei louca,
Mas a loucura é bem pouca
Para o que tenho passado.

Mon adoré,
Je serai folle.
Mais la folie n’est rien
Au regard de ce que j’ai souffert.
Joaquim Frederico de Brito (1894-1977). É loucura, querer-te bem (1930)
Joaquim Frederico de Brito (1894-1977). C’est folie de t’aimer, traduit par L. & L. de : É loucura, querer-te bem (1930)

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