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Beatriz da Conceição (1939-2015)

30 novembre 2015

Morte.

Elle est morte jeudi dernier 26 novembre dans un hôpital de Lisbonne, elle qui était une Nordiste, née à Porto le 21 août 1939. Elle avait commencé sa carrière de fadiste en 1960, ce qui en faisait l’une des plus jeunes des grandes anciennes, le fado ayant comme on sait connu un important reflux après la Révolution des œillets (1974) avant que la vague ne reprenne vigueur et ne déferle à nouveau. Beaucoup des fadistes portée par cette nouvelle vague, notamment Aldina Duarte mais aussi Mísia et Camané, ou encore Raquel Tavares parmi les plus jeunes, lui vouaient une grande admiration, certains la revendiquant comme leur référence absolue.

Son chant était pourtant des plus singuliers, fait d’un timbre grave, de voyelles étirées et modulées à l’extrême sur les accents (ce que personnellement je trouve assez laid), et de finales qu’elle laissait tomber dans le vide sans les chanter vraiment. Ce dernier trait accentuait l’impression qu’on avait en l’écoutant qu’elle assignait à la voix une fonction rythmique venant renforcer les guitares d’accompagnement (guitare classique et éventuellement basse acoustique) dont c’est en principe le rôle.

Son plus grand succès aura probablement été ce très beau Meu corpo écrit pour elle en 1974 par José Carlos Ary dos Santos (paroles) et Fernando Tordo (musique) qu’elle chante ici en 1995, toute en buste et coiffée en caissière des Galeries Lafayette :

Beatriz da Conceição (1939-2015) | Meu corpo. José Carlos Ary dos Santos, paroles et Fernando Tordo, musique ; Beatriz da Conceição, chant ; instrumentistes non identifiés (2 guitares portugaises, dont Custódio Castelo [?], 1 guitare classique, 1 basse acousique). Captation : Lisbonne, 27 mai 1995.
Vidéo : Portugal, RTP [Rádio e Televisão de Portugal], production.

À comparer par exemple avec la version donnée par Celeste Rodrigues de ce même fado.

Meu corpo é um barco sem ter porto
Tempestade no mar morto, sem ti
Meu corpo é apenas um deserto
Quando não me encontro perto, de ti.

Mon corps est un navire sans attache
Tempête dans une mer morte, sans toi
Mon corps n’est rien d’autre qu’un désert
Lorsque je ne me trouve pas près de toi.
Teus olhos são memórias do desejo
São as praias que eu não vejo, em ti
Meus olhos são as lágrimas do Tejo
Onde eu fico e me revejo, sem ti.

Tes yeux sont les souvenirs du désir
Et ces plages que je ne vois pas en toi
Mes yeux sont les larmes du Tage
Où je me tiens et me revois, sans toi.
Quem parte de tão perto nunca leva
A saudade da partida
E as amarras de quem sofre
Quem fica é que se lembra toda a vida
Das saudades de quem parte
E dos olhos de quem morre.

Celui qui s’en va si près largue en partant
Les amarres de celui qui souffre
Et la douleur de la séparation
Celui qui reste porte en soi toute sa vie
Le manque de celui qui part
Et les yeux de celui qui meurt.
Não sei se o orgulho da tristeza
Nos dói mais do que a pobreza, não sei
Mas sei que estou para sempre presa
À ternura sem defesa, que eu dei.

J’ignore si l’orgueil de la tristesse
Nous fait plus mal que la pauvreté
Mais je sais que pour toujours je suis liée
À cette tendresse que j’ai donnée sans compter.
Sózinha numa cama que é só minha
Espero o teu corpo que eu tinha, só meu
Se ouvires o chorar duma criança
Ou o grito da vingança, sou eu.

Seule, dans un lit qui n’est plus qu’à moi
J’attends ton corps, que j’avais pour moi
Si tu entends un enfant qui pleure
Ou un cri de vengeance, c’est moi.
Sou eu, de cabelo solto ao vento
Com olhar e pensamento, no teu
Sou eu na raíz do pensamento
Contra ti e contra o tempo, sou eu.

C’est moi, les cheveux au vent
Les yeux et la tête pleins de toi
C’est moi, à la racine de la souffrance
Contre toi et contre le temps, c’est moi.
José Carlos Ary dos Santos (1937-1984). Meu corpo.
José Carlos Ary dos Santos (1937-1984). Mon corps, traduit de Meu corpo par L. & L.

Voici un autre fado – Alguém (« Quelqu’un »), du répertoire de Fernanda Maria, une chanteuse « à voix », au style beaucoup plus lyrique que celui de Beatriz da Conceição –, enregistré assez récemment (2007) :

Beatriz da Conceição (1939-2015) | Alguém. Guilherme Pereira da Rosa, paroles ; Miguel Ramos, musique (Fado Alberto) ; Beatriz da Conceição, chant ; José Pracana & José Luís Nobre Costa, guitare portugaise ; Jaime Santos Júnior, guitare classique ; Joel Pina, basse acoustique. Captation : Lisbonne, cinéma São Jorge, mai 2007.
Vidéo : Portugal, RTP [Rádio e Televisão de Portugal], production.

Alguém há-de pagar o teu desprezo
Alguém há-de sofrer com teu desdém
Alguém há-de vergar um dia ao peso
Do mal que sinto por gostar de alguém.

Quelqu’un paiera le prix de ton mépris
Quelqu’un souffrira à cause de ton dédain
Quelqu’un pliera un jour sous le poids
De ma souffrance d’avoir aimé quelqu’un.
Alguém que vai surgir na minha vida
Alguém que ainda não sei quem é sequer
Alguém me vai julgar como perdida
Quando afinal não sou senão mulher.

Quelqu’un qui va surgir dans ma vie
Quelqu’un dont je ne sais encore rien
Quelqu’un qui me croira à la dérive
Alors qu’en fait je suis juste une femme.
Por alguém que traiu e me pôs louca
Para alguém, por vingança vou ser má
Por alguém que beijou a minha boca
Vou beijar sem amor, ao Deus dará.

À cause de quelqu’un qui m’a trompée
Je ferai par vengeance souffrir quelqu’un
À cause de quelqu’un qui m’a embrassée
J’embrasserai sans amour celui qui viendra.
Guilherme Pereira da Rosa. Alguém.
Guilherme Pereira da Rosa. Quelqu’un, traduit de Alguém par L. & L.

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