Raquel Tavares — Fala da mulher sozinha
Raquel Tavares. Photo © Manuel Lino
Un visage qui passerait pour métissé, mais une voix bien fadista évocant par exemple celle de la grande Hermínia Silva : Raquel Tavares, qui a grandi dans Alfama, est une Lisboète de toujours. Elle s’est choisi un style de chant traditionnel, et va même parfois chercher sa matière dans un répertoire assez anachronique, celui du fado réaliste (aux thèmes analogues à ceux d’une certaine chanson réaliste française, celle de Fréhel par exemple).
Et ces fados-là, pleins des petits métiers d’autrefois (par exemple O ardinita, le crieur de journaux qui adore sa mère et en fait tout un plat, ou encore A Rosa da Madragoa, la « varina », c’est à dire la vendeuse de poisson dont le cri « réveille la moitié de Lisbonne, qui sourit quand elle passe ») elle les chante avec une forme de sérieux, de premier degré même peut-être, éloignée de l’espièglerie géniale de Carminho qui a le même âge qu’elle.
A fala da mulher sozinha (« Ce que dit la femme solitaire ») n’est pas un fado traditionnel, c’est une chanson des années 1970, reprise par Raquel Tavares dans Bairro (« Quartier »), son dernier album (le deuxième à ce jour), paru en 2008 :
Fala da mulher sozinha / Raquel Tavares, chant ; Bernardo Couto, guitare portugaise ; Diogo Clemente, guitare ; Yami, basse acoustique ; Eduardo Olímpio Espada, paroles ; Paco Bandeira, musique
Já estou farta de estar só, acompanhada de nada
Já estou louca de ser rua tão corrida, tão pisada
Já estou prenhe de amizade
Tão barriga de saudadeAi eu ainda um dia irei rasgar a solidão
E nela entrelaçar
O olhar duma canção
Chegar ao cume, ao cimo, ao alto
Mais longe e mais além
Mas a saber que sou alguémNa cidade sou loucura, sou begónia, sou ciúme
E eu que sonhava ser lume, caminho, atalho e lonjura
Não tenho acento na festa
Sou a migalha que resta.—
J’en ai assez d’être seule, accompagnée de néant
Assez d’être comme une rue où tout le monde passe, que tout le monde piétine,
Je suis comme enceinte d’amitié
Un ventre de saudadeAh un jour je déchirerai la solitude
Je la mêlerai
Au regard d’une chanson
Je monterai, j’irai vers les cimes
J’irai loin, encore plus loin
Mais assurée d’être quelqu’un.Dans cette ville je suis folie, bégonia, jalousie
Et moi qui rêvais d’être braise, chemin, sentier, lointain
Je n’ai pas de part à la fête
Je suis la miette qui resteFala da mulher sozinha / Eduardo Olímpio Espada, paroles ; Paco Bandeira, musique
Les talents de Raquel Tavares ne se bornent pas à son savoir-faire vocal : elle est aussi danseuse, et joue même de la guitare portugaise (dans O ardinita, ci-dessus cité).
Et tu sais quoi ? Raquel Tavares a bien sûr sa page sur le Wikipedia portugais, c’est normal. Et dans deux autres langues, c’est tout. Tu sais lesquelles ? L’anglais et le … brezhoneg oui, le breton !
L. & L.
Bairro / Raquel Tavares, chant ; Bernardo Couto, Guilherme Banza, Ângelo Freire, guitares portugaises ; Diogo Clemente, guitare ; Yami, basse acoustique. — Lisboa : Movieplay, P 2008. — Movieplay MOV 30.606. — EAN 5602896115926.
Disponible chez CDGO (aussi en version CD + DVD)
dans le 1976 simone de oliveira a chanté cette chanson « fala da mulher sozinha » dans leur album « as palavras que eu cantei » (decca slpdx 542). pour ça, nést pas vrais que la chanson est de les années 90.
Ah, en effet c’est tout à fait exact ! Merci beaucoup pour cette information, je rectifie dans le texte.
Qualquer dia hei-de escrever algo na Simone de Oliveira…
Aditionel: Paco Bandeira a chanté cette meme chanson sur leur album « cara ou coroa » (decca) dans le 1976. Paco est l´auteur de la musique.