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Cristina Branco — Sonnet 136 de Shakespeare (Se a alma te reprova)

15 septembre 2012

Se a alma te reprova eu venha perto,
Jura à cega, que o teu ardor eu fosse;
Ardor tem, como saber, sítio certo,
E assim me enchas, amor, medida doce.
Ardor enche de ardor e amor teu cofre,
Ai, lardeia-o de ardor!, e ardor apronto
E bem prova que em vazadouro sofre:
Se o número é grande, eu só não conto.
Então que eu passe em grupo sem ser visto,
Sendo um nas contas dessa feitoria;
Tem-me em nada, se te agradar registo
De que este nada em ti é doçaria.

Faz só meu nome teu amor e amor;
E amas-me então pois eu te chamo Ardor.

William Shakespeare (1564-1616). Sonnet 135. Traduction portugaise (Vasco Graça Moura). Source : Cristina Branco, Sensus, Universal Classics France, cop. 2003.

Cristina Branco. Se a alma te reprova / poème de William Shakespeare ; Vasco Graça Moura, adaptation portugaise ; Custódio Castelo, musique ; Cristina Branco, chant ; Custódio Castelo, guitare portugaise ; Alexandre Silva, guitare ; Fernando Maia, basse acoustique ; Ricardo Dias, piano. — Vers 2004/2006. — Se a alma te reprova : adaptation du Sonnet 136 de William Shakespeare..

Détestable piano de Ricardo Dias, limite vulgaire, qui prend le pas sur la guitare portugaise de Custódio Castelo. Cristina Branco un peu à côté de la plaque elle aussi. Mieux vaut — de loin — l’enregistrement studio de l’album Sensus (voir au bas du billet).

Au fond cette tonalité est assez en accord avec celle du sonnet 136, qui est plein de sous-entendus sexuels appuyés. Il est particulièrement difficile à traduire en raison des multiples significations, explicites ou non, du mot will, sur lesquelles Shakespeare joue abondamment : la volonté, le désir (y compris sexuel), le prénom William dont il est un diminutif. Mais will était aussi à la Renaissance un mot argotique désignant l’organe sexuel, masculin ou féminin. Ce possible sens, il y a une intention évidente qu’il soit perçu, par exemple aux vers 5 et 6, qui prennent dès lors un éclairage des plus crus :

‘Will’, will fulfil the treasure of thy love,
Ay, fill it full with wills, and my will one.

C’est à dire, littéralement :

‘Will’ [William, ou le désir] emplira le trésor de ton amour,
Oui, il l’emplira [de désirs / de pénis], et mon [désir / pénis] un parmi d’autres.

Voir les traductions  de Robert Ellrodt et d’Yves Bonnefoy ci-dessous.

If thy soul check thee that I come so near,
Swear to thy blind soul that I was thy ‘Will’,
And will, thy soul knows, is admitted there;
Thus far for love, my love-suit, sweet, fulfil.
‘Will’, will fulfil the treasure of thy love,
Ay, fill it full with wills, and my will one.
In things of great receipt with ease we prove
Among a number one is reckon’d none:
Then in the number let me pass untold,
Though in thy store’s account I one must be;
For nothing hold me, so it please thee hold
That nothing me, a something sweet to thee:

Make but my name thy love, and love that still,
And then thou lov’st me for my name is ‘Will.’

William Shakespeare (1564-1616). Sonnet 135. Source : Projet Gutengerg.

——

Si ton âme, quand j’approche trop près, te retient,
Jure à ton âme aveugle que j’étais ton Désir,
Et, ton âme le sait, là désir trouve accueil :
Par amour donc, très chère, emplis mon vœu d’amour.
De ton amour Désir veut emplir le trésor ;
Oui, l’emplir de désirs et, parmi tous, le mien.
En large réceptacle, on le prouve aisément,
Perdu dans le grand nombre, un n’a valeur de nombre ;
Laisse-moi dans le nombre passer sans qu’on me compte,
Bien qu’en ton inventaire il faut que j’en sois un ;
Tiens-moi pour rien pourvu que ce rien, il te plaise
De le tenir pou quelque chose de doux pour toi.

De mon seul nom fais ton amour, aimé toujours :
Tu m’aimeras alors car mon nom est Désir.

William Shakespeare (1564-1616). Sonnet 29. Traduction française (Robert Ellrodt).

Si ton âme renâcle à me voir si près,
Dis à cette âme aveugle : c’est mon Will,
Car elle saura bien ce que le mot veut dire,
Et ton goût du plaisir saura me satisfaire.

Will ? Il aura comblé ta faim d’amour
Que tant de désirs comblent, et moi l’un d’eux.
En des lieux de si bel accueil il va de soi
Qu’un parmi tant ne se remarque guère.

Laisse-moi donc passer inaperçu
Bien qu’en tes sensations j’aie à compter,
Tiens-moi pour rien, mais un rien qui te tienne,
Un rien mais quelque chose qui te soit doux.

Aime mon nom seulement, et toujours,
Et ce sera m’aimer, car tu sais ce qu’est Will.

William Shakespeare (1564-1616). Sonnet 29. Traduction française (Yves Bonnefoy).

Sur Yves Bonnefoy, traducteur des Sonnets de Shakespeare :
Michael Edwards « Yves Bonnefoy et les Sonnets de Shakespeare », Littérature 2/2008 (n° 150), p. 25-39.
URL : www.cairn.info/revue-litterature-2008-2-page-25.htm.
DOI : 10.3917/litt.150.0025.

L. & L.

——

Branco, Cristina
Sensus (2003)

Cristina Branco. Sensus (2003)Sonnet / Cristina Branco, chant ; Custódio Castelo, guitare portugaise ; Alexandre Silva, guitare ; Miguel Carvalhinho, guitare classique ; Fernando Maia, basse acoustique ; Ben Wolf, contrebasse ; André Dequech, piano. – [Antony] : [Universal licensing music] : [distrib. Universal division Mercury], P 2003. – 1 disque compact + 1 brochure.

Enregistré de septembre à décembre 2002, aux studios Pé de Vento, Salvaterra De Magos (Portugal), sauf un titre : studios Right Track, New York.

Emarcy classics 067 168-2. – EAN 0044006716824

Cristina Branco sur Myspace

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Shakespeare, William (1564-1616)
Sonnets. Traduction française (Ellrodt)

Shakespeare. Sonnets (traduction Robert Ellrodt). BabelSonnets / Shakespeare ; texte établi, traduit de l’anglais et présenté par Robert Ellrodt. – Éd. bilingue. – Arles : Actes Sud ; [Montréal] : Leméac, impr. 2007. – 1 vol. (444 p.) ; 18 cm. – (Babel ; 847).

Texte anglais et traduction française en regard. – Bibliogr., 5 p.

ISBN 978-2-7427-6938-4 (Actes Sud). – ISBN 978-2-7609-2711-7 (Leméac). – EAN 9782742769384

Shakespeare, William (1564-1616)
Sonnets. Traduction française (Bonnefoy)

Shakespeare. Sonnets (traduction Yves Bonnefoy). Gallimard PoésieLes sonnets ; précédés de Vénus et Adonis ; Le viol de Lucrèce ; Phénix et Colombe / William Shakespeare ; présentation et traduction d’Yves Bonnefoy. – [Paris] : Gallimard, impr. 2007. – 1 vol. (333 p.) ; 18 cm. – (Collection Poésie ; 437).

Bibliogr., 2 p.

ISBN 978-2-07034242-6. – EAN 9782070342426

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