Lula Pena, Manoel de Oliveira, Bologne
Manoel de Oliveira (1908-….). Porto de mon enfance = Porto da minha infância (2002). Affiche française.
Le charme des villes italiennes en hiver, lorsqu’il fait nuit à quatre heures de l’après-midi. Bologne est une de celles que je ne connais pas. Je connais ses voisines, Parme, Ferrare, Ravenne, Modène, mais elle non.
Le charme de Lula Pena, charme absolu. Elle a vécu en Belgique, elle parle un français très légèrement teinté de la sonorité du portugais : c’est adorable.
Je ne sais pas de quel événement il s’agit, pourquoi elle était là, avec, ou en même temps, que Manoel de Oliveira. Apparemment c’est l’hiver de 2003, à la cinémathèque de Bologne (Cineteca di Bologna).
J’ai essayé ci-dessous de transcrire les propos de Manoel de Oliveira (né le 11 décembre 1908, c’est à dire qu’il avait alors 93 ans) ; il y a probablement quelques approximations, mais l’essentiel y est je pense.
L. & L.
Lula Pena parlant du fado et du cinéma portugais. Manoel de Oliveira parlant du cinéma portugais. Extraits de : Porto da Minha Infância (2002) et de : O princípio da incerteza (2002).
Quand je fais un film, il ne s’agit pas de faire de l’argent, mais de disperser ce qui vient dans l’âme, et que je pense pouvoir, au travers de mon âme, diffuser aussi dans celle des autres ; et donc, c’est me mettre à la place des autres, ou mettre les autres à ma place […]
Il y a deux tendances dans le cinéma portugais : l’une consiste à rechercher l’imitation du cinéma étranger, italien, français, américain ou autre ; ou bien un cinéma populaire qui vient de la revista portuguesa, moins intéressant, c’est à dire un cinéma plus commercial au fond. Mais à partir d’un certain moment, surtout après la révolution des œillets, sont arrivés des jeunes étrangers à cela, produisant un cinéma qu’ils ressentaient. Et comme en matière d’art, et de cinéma en particulier, la plus grande des originalités est la sincérité du réalisateur dans tout ce qu’il fait, cela leur donne un ton très particulier, très personnel. Il y en a une demi-douzaine, par exemple un réalisateur qui s’appelle [João Mário] Grilo, un autre qui s’appelle Costa, un autre qui s’appelle João Botelho, bon, tous ceux-là font un cinéma différent, particulier, peut-être plus difficile à comprendre pour le public populaire.
Le cinéma est une synthèse de tous les arts, et de tous les arts il est celui qui donne le mieux l’illusion de la vie même.
[Quando] faço um film, não é fazer dinheiro, é dispersar aquilo que vem na alma, e que, através da minha alma eu penso que se passa também na alma dos outros ; e portanto é… é pôr-me no lugar dos outros, ou pôr os outros no meu lugar […]
Há duas feições no cinema português: uma é procurar imitar o cinema estrangeiro, seja italiano, ou francês, ou o cinema americano; ou então um cinema popular que vem da revista, mais… menos interessante, quer dizer, um cinema no fundo mais comercial. Mas a partir de certa altura começaram a aparecer, sobre tudo depois do 25 de Abril, a aparecer jovens [com…] desprendidos disso, a fazer um cinema que sentiam. E como a maior das originalidades nas artes, e no cinema particularmente, é a sinceridade do realizador em tudo o que faz, isso deu-lhes um tom muito particular, muito pessoal. Há uma meia dúzia, por exemplo um realizador chamado [João Mário] Grilo, outro chamado Costa, um outro chamado João Botelho, bom, esses [fazem] um cinema distincto, particular, talvez mais difícil para a compreensão do povo.
O cinema é uma síntese de todas as artes e, […] de todas as artes é aquela que mais ilude a propria vida.
Lula Pena sur Myspace
L’article Manoel de Oliveira dans Wikipedia
Manoel de Oliveira (1908-….). Porto da Minha Infância (2002) dans IMDb.
Manoel de Oliveira (1908-….). O princípio da incerteza (2002) dans IMDb.
La Cineteca di Bologna (Bologne, Italie).
Je vous confirme que Bologne est une très belle ville 🙂
J’ai vu le film « Porto de mon enfance » de Manoel de Oliveira. Au début du film on peut entend en alternance avec la voix du narrateur, une chanteuse à capella (que l’on entend d’aussi dans le trailer http://www.youtube.com/watch?v=QooR4LEWZHg )
Sauriez-vous de quelle chanson il s’agit, et qui est l’interprète ?
NB
Tout à fait d’accord quant à Bologne 🙂
C’est la femme de Manoel de Oliveira, Maria Isabel de Oliveira, qui chante dans le film. La chanson est un poème de Guerra Junqueiro (1850-1923), Regresso ao lar (Retour au foyer), daté de 1890, mis en musique par un António Viana que je ne connais pas.
Texte du poème ici.
merci pour votre réponse.
Vianna est cité ici dans « BRIEF OVERVIEW OF PORTUGUESE MUSIC
(1450-PRESENT) » http://members.multimania.co.uk/ilamsuk/ILAMS-artigo.htm : Pianist-composer José António Vianna da Motta (1868-1948) went, on the advice of Liszt pupil, Sofie Mentor, to Berlin to study where he encountered the intellectual and musical elite. Later studying with Liszt in Weimar, he returned to Portugal because of the ensuing WWI, becoming Director of the National Conservatory. Et sur Wikipédia : http://pt.wikipedia.org/wiki/Vianna_da_Motta
Le répertoire de la musique savante portugaise est certainement très riche, mais pas suffisamment enregistrée. Je connais peu de compositeurs à part Pedro de Escobar et Carlos de Seixas, et peu d’interprète à part la grande pianiste Maria João Pires.
Bravo, et merci !