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Amália • 3 chansons du film « A Severa » (1931). 3. Arraial de Santo António

10 octobre 2023

Fait suite à :

Dans le film A Severa, Arraial de Santo António (« La fête de la Saint Antoine »), une marche efficace et joyeuse — une vraie rengaine, à vrai dire — fait contrepoint à la mort de l’héroïne. Elle est d’abord jouée sous les fenêtres de la Severa mourante, alors que la ville est en fête à l’occasion de la Saint Antoine. Lorsqu’elle éclate pour la seconde fois, quelques minutes plus tard, la Severa est morte et c’est la fin du film.

Arraial de Santo António est interprété par Mariana Alves, qui n’est créditée au générique que du rôle de « chanteuse ». Je ne sais rien d’elle, sinon qu’on la retrouve dans deux ou trois autres films de la même époque. Cet extrait est la toute dernière séquence de A Severa : l’héroïne vient de mourir, dans l’indifférence de la rue dont la liesse populaire s’est emparée. On n’entend que les deux derniers couplets de la chanson.

A Severa (1931). José Leitão de Barros, réalisation ; José Leitão de Barros, Júlio Dantas, Jacques-Bernard Brunius & René Clair, scénario ; Júlio Dantas, dialogues et paroles des chansons ; Frederico de Freitas, musique originale et musique des chansons. D’après le roman A Severa (1901) de Júlio Dantas.
Distribution : Dina Teresa (Severa) ; António Luís Lopes (D. João, conde de Marialva) ; António de Almeida Lavradio (D. José) ; Ribeiro Lopes (Custódia) ; Silvestre Alegrim (Timpanas), …
Tournage : Portugal (extérieurs), 1930 ; France (studios d’Épinay-sur-Seine), 1931.
Production : Portugal, Sociedade Universal de Superfilmes (SUS), 1931.
Sortie : 1931 (Portugal).
Chanson :

Arraial de Santo António. Extrait. Júlio Dantas, paroles ; Frederico de Freitas, musique.
Mariana Alves, chant ; accompagnement d’orchestre.
Portugal, 1931.

Pour l’enregistrement sur disque, réalisé à Paris en février 1931 alors que le tournage du film se poursuivait aux studios d’Épinay-sur-Seine (voir le billet précédent), Mariana Alves, déjà rentrée au Portugal, a été remplacée par Maria Sampaio, à la voix un peu plus acide, qui dans le film interprète la marquise de Seide (la rivale de Severa pour la conquête du duc de Marialva).

Maria Sampaio (1???-19??)Arraial de Santo António. Júlio Dantas, paroles ; Frederico de Freitas, musique.
Maria Sampaio, chant ; accompagnement d’orchestre et de chœurs ; Frederico de Freitas, direction.
Enregistrement : Paris, salle Pleyel, 8 février 1931.
Première publication : disque 78t Solidó dos bolieiros (do fonofilme « A Severa ») / Silvestre Alegrim. Arraial de Sto. António (do fonofilme « A Severa ») / Maria Sampaio. Royaume-Uni & Portugal, Columbia, 1931.

Cheira a rua a alecrim
A berlinda passa a trote
Vai a noiva de palmito
Vai a noiva de palmito
Vai o noivo de capote
La rue sent le romarin
La berline passe au trot
La mariée tient un rameau
La mariée tient un rameau
Le marié est en manteau.
………
Refrain
Nem uma te escapa
Ó Santo Antoninho
Põe a tua capa
Mete-te ao caminho
………
………
Refrain
Aucune ne t’échappe
Mon joli Saint Antoine
Prends ta pèlerine
Et mets-toi en chemin !
………
Já lá tem lençóis de renda
A alfazema está a arder
Para divertir um homem
Para divertir um homem
Não há como uma mulher
Voici des draps de dentelle,
On brûle de la lavande.
Pour divertir un homme
Pour divertir un homme
Rien ne vaut une femme.
A menina vai deitar-se
Que a benzeu o padre cura
É melhor lá estar em casa
É melhor lá estar em casa
Que espreitar à fechadura
La mariée va se coucher
Avec la bénédiction du curé.
Il vaut mieux rester chez soi
Il vaut mieux rester chez soi
Que d’épier par la serrure !
Ai o capote encarnado
Ai o lenço de cambraia
Ai a luz que se apagou
Ai a luz que se apagou
Quando ia a caír-lhe a saia
Ah le manteau écarlate
Ah le fichu de batiste
Ah la lampe qui s’éteint
Ah la lampe qui s’éteint
Juste quand sa jupe tombe !
Júlio Dantas (1876-1962). Arraial de Santo António, du film A Severa (Portugal, 1931).
Júlio Dantas (1876-1962). Fête de la Saint Antoine, traduit de Arraial de Santo António, du film A Severa (Portugal, 1931) par L. & L.

Quant à Amália, elle a enregistré Arraial de Santo António très tardivement. On en trouve sur l’Internet une captation de studio, datant très probablement des années 1980, restée inédite à ma connaissance.

Amália Rodrigues (1920-1999)Arraial de Santo António. Júlio Dantas, paroles ; Frederico de Freitas, musique.
Amália Rodrigues, chant ; accompagnement d’orchestre.
Inédit commercialement. [Portugal, années 1980?].

Cependant Arraial de Santo António figurait au programme de son récital triomphal du Coliseu dos recreios de Lisbonne en 1987, dont il clôturait la première partie. En guise de présentation, on entend la chanteuse annoncer donner cette pièce pour la première fois — ce qu’elle fait, ni très juste ni très en rythme, soutenue par une petite fanfare.

Amália Rodrigues (1920-1999)Arraial de Santo António. Júlio Dantas, paroles ; Frederico de Freitas, musique.
Amália Rodrigues, chant ; accompagnement d’orchestre de fanfare (non crédité sur l’album).
Enregistrement public : Lisbonne, Coliseu dos recreios, 3 avril 1987.
Extrait de l’album : Coliseu, Lisboa, 3 de Abril 1987 / Amália. Portugal, Valentim de Carvalho, ℗ 1987.

Des trois chansons extraites de A Severa qu’Amália ait mises à son répertoire (Novo fado da Severa, Timpanas et Arraial de Santo António) seule la première est extraite du rôle-titre. Des trois c’est aussi le seul fado. En voici deux autres, enregistrés sur disque après la sortie du film, donc au cours du second semestre de 1931. Interprétés par Dina Teresa, la « Severa » du film, ils sont quasiment identiques à leurs versions originales — à ceci près qu’ils sont enchaînés sur le disque, ce qui n’est pas le cas dans le film. Na taberna (« Dans la taverne ») est un fado au style de Coimbra, tandis que le Fado da espera de toiros évoque le schéma mélodique et rythmique du « Fado Mouraria » (plus précisément le « Fado Mouraria estilizado » de Jaime Santos qui sert de musique au délicieux Zanguei-me com meu amor d’Amália).

Dina Teresa (1902-[1984?])Na taberna suivi de Fado da espera de toiros. Júlio Dantas, paroles ; Frederico de Freitas, musique.
Dina Teresa, chant ; accompagnement de guitare portugaise et guitare.
Enregistrement : [Barcelone, sala Granados, studios de La Voz de España ?], second semestre de 1931.
Première publication : disque 78t Na taberna ; Fado da espera de toiros do fonofilme « A Severa » ; Canção da Severa [da] revista « Ai-Ló » / Dina Tereza. Royaume-Uni & Portugal, Columbia, 1931.
Extrait de la collection numérique de l’Arquivo sonoro digital du Museu do Fado (Lisbonne).

O meu destino na vida
Já adivinho qual é
Correr sem saber p’ra onde
Chorar sem saber porquê
Mon destin dans la vie,
Je devine à présent ce qu’il est :
Courir sans savoir où je cours
Et pleurer en ignorant pourquoi.
Nunca ninguém entendeu
Um coração de mulher
O homem que nós queremos
É o homem que não nos quer.
Jamais nul n’a compris
Le cœur d’une femme.
L’homme que nous aimons
Est celui qui ne nous aime pas.
Júlio Dantas (1876-1962). Na taberna, du film A Severa (Portugal, 1931).
Júlio Dantas (1876-1962). Dans la taverne, traduit de Na taberna, du film A Severa (Portugal, 1931) par L. & L.

Pour mettre un terme à cette petite série sur le film A Severa, voici un extrait d’un documentaire réalisé par la télévision portugaise sur Dina Teresa. On y voit l’actrice, très âgée (enregistrée probablement en 1982, c’est à dire deux ans avant sa mort), au Brésil où elle s’était expatriée. Elle chante avec encore beaucoup d’allant le Fado da espera de toiros, a capella. Cette séquence est suivie de l’extrait correspondant du film.

Dina Teresa (1902-[1984?]), très âgée, chantant Fado da espera de toiros, du film A Severa (1931), suivi d’un extrait de ce film.
Extrait d’une émission de la RTP (Rádio e Televisão de Portugal), probablement Chorai, fadistas, chorai, un épisode de la série RTP Brasil consacré à Dina Teresa. Portugal, 1982.
Chanson :

Fado da espera de toiros. Júlio Dantas, paroles ; Frederico de Freitas, musique.
Dina Teresa (1902-[1984?]), chant.
Portugal, 1982 (première séquence) ; 1931 (extrait du film A Severa).

Vi um toiro em Salvaterra
Matar dois cavalos velhos
Vai eu cantei-lhe à guitarra
E o boi caiu de joelhos
J’ai vu un taureau à Salvaterra
Tuer deux chevaux vénérables.
J’ai pris ma guitare et j’ai chanté,
Alors le taureau est tombé à genoux.
À garupa do lazão
Tanto ao teu corpo me uni
Que o teu cavalo julgou
Que só te levava a ti
En selle sur l’alezan
Je me suis si bien unie à ton corps
Que ton cheval a dû croire
Qu’il n’emportait que toi.
A tua cinta encarnada
Aperta-a bem no caminho
Coração que é de nós dois
Deve andar conchegadinho
Ta ceinture écarlate,
Serre-la bien en chemin
Car ce cœur qui bat pour nous deux
Doit être bien protégé.
Vivam toiros e cabrestos
Viva a gente da cidade
Eu não troco dez moedas
Por um real de liberdade
Vive les taureaux,
Vive les gens de la ville !
Je n’échange pas ma liberté
Même contre dix pièces d’or !
Júlio Dantas (1876-1962). Fado da espera de toiros, du film A Severa (Portugal, 1931).
Júlio Dantas (1876-1962). Fado de l’attente des taureaux, traduit de Fado da espera de toiros, du film A Severa (Portugal, 1931) par L. & L.

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