3 voyages en train
Il y avait des trains, autrefois. On s’y asseyait. Il y avait d’autres voyageurs, on engageait la conversation.
On disait « – Vous allez jusqu’à Paris ? – Oui, je prend toujours ce train. J’ai horreur du tgv, vous savez. Et puis, devoir passer par Bordeaux pour aller à Paris quand on vient de Toulouse, quelle abomination, quelle absurdité ! Vraiment je préfère ce train, par Limoges. C’est plus long bien sûr, mais quelle importance ? D’ailleurs j’aime mieux arriver gare d’Austerlitz. »
On disait ça, ou autre chose. Parfois rien.
………
José Afonso (1929-1987) • No comboio descendente. Poème de Fernando Pessoa ; José Afonso, musique.
José Afonso, chant ; José Niza, direction musicale et production.
Enregistrement : Madrid (Espagne), studio Celada, 6-13 novembre 1972.
Extrait de l’album Eu vou ser como a toupeira / José Afonso. Portugal, ℗ 1972.
………
No comboio descendente
Vinha tudo à gargalhada,
Uns por verem rir os outros
E os outros sem ser por nada —
No comboio descendente
De Queluz à Cruz Quebrada…
Dans le train descendant
Tous les gens rigolaient,
De voir rire les autres
Ou sans aucun motif —
Dans le train descendant :
Queluz-Cruz Quebrada…
No comboio descendente
Vinham todos à janela,
Uns calados para os outros
E os outros a dar-lhes trela —
No comboio descendente
Da Cruz Quebrada a Palmela…
Dans le train descendant
Tous étaient aux fenêtres,
Les uns ne pipant mot
À leurs bonimenteurs —
Dans le train descendant :
Cruz Quebrada-Moita…
No comboio descendente
Mas que grande reinação!
Uns dormindo, outros com sono,
E os outros nem sim nem não —
No comboio descendente
De Palmela a Portimão…
Dans le train descendant
Mais quel grand canular !
Dormeurs, ensommeillés,
D’autres entre les deux —
Dans le train descendant
Moita-Portimão…
Fernando Pessoa (1888-1935). No comboio descendente, extrait de Poemas para Lili (sans date). Fernando Pessoa (1888-1935). Dans le train descendant, traduit de : No comboio descendente (sans date) par Patrick Quillier. Source : Fernando Pessoa, Œuvres poétiques, Gallimard, 2001 (Bibliothèque de la Pléiade), page 1308.
………
Jeanne Moreau (1928-2017) • Les wagons longs de lit. Cyrus Bassiak [pseudonyme de Serge Rezvani], paroles & musique.
Jeanne Moreau, chant ; Elek Bacsik, guitare ; Michel Gaudry, contrebasse ; Elek Bacsik, , arrangements. Enregistrement : Paris, studios Arsonor.
Extrait de l’album Jeanne Moreau chante 12 nouvelles chansons de Cyrus Bassiak. France, ℗ 1967.
………
Il m’regardait
J’me détournais
Il m’souriait
J’m’en empêchais
Et il m’a dit en se penchant :
« La fumée, s’il vous plaît, est-ce qu’ça vous déplaît ?
Vous fumez ? Permettez ! Alors, c’est parfait
Voulez-vous mes journaux car le temps est long ?
Pour le tuer, parlons donc, wagons longs de lit »On s’est connus dans le wagon de lit de long
Le wagon long, le wagon long de nuit
Du Paris–Lyon–Marseille-Menton qui file de nuit
Et nous emporte vers l’Italie
On s’est souri
Dans les sanglots de lit de long, les sanglots longs
Du wagon long de nuit
Et il m’a dit au creux d’l’oreille :
« Dites-moi tu, dis-moi toi, j’vous dirai pareil
À quoi bon nos prénoms
Appelez-moi chéri
Appelle-moi mon amour
On s’connaît à peine
Qu’on s’dise vous, qu’on s’dise tu
Qu’importe, pour une nuit ? »Dans le wagon de lit de long, passé minuit
On s’est aimé, aimé à la folie
Le Paris–Lyon–Marseille–Menton toute la nuit
Nous emportait vers l’Italie.On s’est aimé dans les sanglots de lit de long
Les sanglots longs des wagons longs de nuit
Et je lui dis au creux d’l’oreille :
« Être à tu, être à toi, être vous et moi
Quand on n’ se connaît pas
À tu et à toi
Savez-vous, sais-tu bien, qu’j’suis follement émue
D’être à vous, d’être à tu, d’être dans vos bras. »Le lendemain, il m’a souri « Adieu chérie
J’descends ici
J’te quitte à Vintimille. »
Le Paris–Lyon–Marseille–Menton de lit de long
De long de lit m’a emportée, nous séparant
Vers le soleil à tout jamais,
Bien loin, bien loin, vers l’Italie.
Cyrus Bassiak (pseudonyme de Serge Rezvani). Les wagons longs de lit (1967).
………
Alice & Franco Battiato • I treni di Tozeur. Franco Battiato & Rosario (Saro) Cosentino, paroles ; Franco Battiato & Giusto Pio, musique.
Alice & Franco Battiato, chant ; Filippo Destrieri, claviers ; Alberto Radius, guitares ; Alfredo Riccardi, violoncelle ; Lino Capra Vaccina, tabla ; Gianfranco d’Adda, batterie ; Marilyn Turner, chœurs ; Franco Battiato, arrangement ; Giusto Pio, direction.
Enregistrement : Milan (Italie), studio Radius. Italie, ℗ 1984.
………
Nei villaggi di frontiera guardano passare i treni
Le strade deserte di Tozeur
Da una casa lontana tua madre mi vede
Si ricorda di me, delle mie abitudini
Dans les villages de frontière, les routes désertes de Tozeur
Regardent passer les trains.
D’une maison éloignée ta mère me voit,
Elle se souvient de moi, de mes habitudes.
E per un istante ritorna la voglia di vivere
A un’altra velocità
Passano ancora lenti i treni per Tozeur
Et, un instant, revient l’envie de vivre
À une autre vitesse.
Les trains qui vont à Tozeur passent encore avec lenteur.
Nelle chiese abbandonate si preparano rifugi
E nuove astronavi per viaggi interstellari
In una vecchia miniera distese di sale
E un ricordo di me, come un incantesimo
Dans les églises abandonnées on prépare des refuges
Et de nouveaux astronefs pour des voyages interstellaires
Dans une ancienne mine, des plaques de sel
Et un souvenir de moi, comme un sortilège.
E per un istante ritorna la voglia di vivere
A un’altra velocità
Passano ancora lenti i treni per Tozeur
Et, un instant, revient l’envie de vivre
À une autre vitesse.
Les trains qui vont à Tozeur passent encore avec lenteur.
Nei villaggi di frontiera guardano passare
I treni per Tozeur
Dans les villages de frontière, les gens
Regardent passer les trains qui vont à Tozeur.
Franco Battiato & Rosario (Saro) Cosentino. I treni di Tozeur (1984). Franco Battiato & Rosario (Saro) Cosentino. Les trains de Tozeur, traduit de : I treni di Tozeur (1984) par L. & L.
………
Comme un vent de nostalgie ces voyages en train, avec bien sûr une mention particulière pour les wagons longs de lit