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Argentina Santos — Volta atrás vida vivida

12 février 2012

Argentina Santos en 2007, par José Goulão Argentina Santos en 2007. Photo José Goulão (Flickr).

Enchanté de la parution de Cantigas d’amigos le jour de mon propre anniversaire, j’en ai oublié que c’est aussi celui de quelqu’un d’autre. Et cet oubli est impardonnable, d’autant plus qu’il est irréparable.

Le 6 février dernier, Argentina Santos, sans aucun doute l’une des deux ou trois plus grandes fadistes vivantes, a eu 88 ans. Elle est née en 1924 (1926 selon certaines sources), à Lisbonne.

On l’entend évoquer sa vie dans cette bande-annonce d’un documentaire de près de deux heures qui lui a été consacré en 2010 ; déchargeant la pêche sur les quais à 14 ans, vendant du poisson dans la rue à 15 ans, 16 ans.

Bande-annonce du documentaire Vida vivida / Gonçalo Megre, réalisateur ; Diogo Queiroz de Andrade, producteur. Portugal : VitriMedia, 2010.

Elle parle de son restaurant A Parreirinha de Alfama, où on a toujours chanté le fado vadio, c’est à dire le fado de tout le monde, un fado amateur, que n’importe qui peut produire, un fado spontané. Elle se contentait de tenir la maison, et d’y faire la cuisine, cela depuis 1950. Mais se joignant un soir à une desgarrada, c’est à dire un fado à plusieurs chanteurs qui tour à tour prennent un couplet, elle a su qu’elle était fadiste. Car elle dit aussi dans ce film que le fado ne peut pas s’apprendre, qu’on l’a en soi. Ou non.

Le documentaire, Viva vivida (Vie vécue), prend son titre à l’un des fados du répertoire d’Argentina Santos, Volta atrás, vida vivida, que voici en entier :

Volta atrás, vida vivida / Argentina Santos, chant ; João de Freitas, paroles ; Filipe Pinto, musique (fado Meia noite). Enregistrement public, Lisbonne, vers 2010.

Volta atrás vida vivida
Para eu tornar a ver
Aquela vida perdida
Que nunca soube viver

Voltar de novo quem dera
A tal tempo, que saudade
Volta sempre a primavera
Só não volta a mocidade

A vida começa cedo
Mas assim que ela começa
Começamos por ter medo
Que ela se acabe depressa

O tempo vai-se passando
E a gente vai-se iludindo
Ora rindo ora chorando
Ora chorando ora rindo

Meu Deus, como o tempo passa
Dizemos de quando em quando
Afinal, o tempo fica
A gente é que vai passando
João de Freitas. Volta atrás vida vivida

——

Reviens, vie vécue
Fais-moi voir à nouveau
Cette vie perdue
Que jamais je n’ai su vivre

Ah pouvoir encore
Revenir à ce temps-là !
Le printemps revient, oui
Mais la jeunesse jamais

La vie commence de bonne heure
Mais à peine commence-t-elle
Que nous vient la peur
De la voir se terminer

Le temps s’écoule
Sur nos illusions
On rit, puis on pleure
On pleure, puis on rit

Mon Dieu comme le temps passe !
C’est ce qu’on dit de temps en temps
À vrai dire le temps reste
Et c’est bien nous qui passons
João de Freitas. Volta atrás vida vivida. Traduction L. & L.

L’an dernier Argentina Santos n’allait pas très bien. Il faut lui souhaiter ce miracle : que pour elle la vie rebrousse chemin.

Et peut-être qu’elle le fera pour nous aussi ?

L. & L.

——

Argentina Santos sur le site du Musée du fado (Lisbonne)
Argentina Santos dans Wikipedia (en portugais)

2 commentaires leave one →
  1. Simon permalink
    16 octobre 2015 12:35

    Merci beaucoup pour cette belle traduction. Sinhora Santos demeure maintenant dans une maison de repos pour fadistas, entourée de ses anciens camarades.

Trackbacks

  1. L’une l’est l’autre pas | Je pleure sans raison que je pourrais vous dire

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